Dredge

Il est pas frais mon poisson ?!

Pour commencer

Nommé dans la catégorie du meilleur jeu indépendant de 2023 aux Games Award, Dredge avait déjà fait parler de lui dès sa sortie. Perso, je n’aurais jamais mis une pièce sur un jeu de pêche sans un argument particulier, mis en avant dans tous les trailers : ses références ouvertement lovecraftiennes. Oui, pour moi c’est suffisant.

Aventure Indé JuanPatatos PC PS4 PS5 Switch Xbox One Xbox Series

Pour se mettre en condition

On écoute quoi ?

On boit quoi ?

Un grog, une vraie boisson de marin.

On mange quoi ?

Une bonne assiette de crustacés.

Alors, ça dit quoi ?

Dredge est un jeu d’aventure autour de la pêche, saupoudré d’éléments horrifiques. Nous incarnons un pêcheur de la première moitié du 20è siècle, qui se rend avec son chalutier dans un petit archipel pour répondre à une offre d’emploi. Après être arrivé sur l’île et avoir rencontré quelques personnalités locales, on va se mettre au boulot et arpenter les eaux pour ramener des poissons à quai. Rapidement, on va comprendre que quelque chose ne tourne pas rond. Les habitants semblent cacher de lourds secrets, un épais brouillard surnaturel se lève chaque nuit, certains poiscailles sont sacrément difformes et un étrange personnage vous demande de lui rapporter des artefacts occultes perdus au fond de la mer, dans un but obscur. C’est cette quête principale qui servira de fil conducteur, et nous guidera à travers toute la carte pour arriver à la fin du jeu. Le scénario de Dredge est intéressant, fidèle à l’atmosphère d’un récit lovecraftien et propose des rebondissements inattendus (et accessoirement deux fins différentes). On regrettera peut-être la progression un peu lente de son déroulé, à cause d’histoires secondaires qui développe l’univers plus que l’intrigue, et, comme souvent, une histoire assez cryptique dont la compréhension globale tient à des micro-détails à bien interpréter. J’ai fini par regarder une vidéo sur Youtube pour tout capter après avoir fini le jeu, comme d’hab.

Dredge
Une belle journée de travail qui commence

Dans Dredge, on contrôlera uniquement notre chalutier à travers une carte ouverte, qui n’est pas immense mais qui propose un terrain de jeu satisfaisant. Elle est composée de 5 zones principales, facilement reconnaissables et ayant leur propre biotope, ainsi que d’espaces de pleine mer qui les sépare. La prise en main du bateau est agréable et instinctive, même si la maniabilité dans les petits espaces peut-être galère, d’autant plus dans un jeu où le moindre frôlement avec un rocher abîme votre navire. Les points de pêche sont symbolisés par de petites aires de remous à la surface de l’eau. Quand on passe au-dessus d’un banc de poissons, on lance un mini-jeu d’adresse et de rhytme, sa réussite permettant de remonter la bête plus rapidement, ou parfois d’en choper une plus grosse. Ces mini-jeux se diversifient au cours de l’aventure, et permettent de dynamiser cette activité que l’on va répéter plusieurs centaines de fois. Rapidement, on va tomber sur des abominations, c’est à dire des versions difformes et monstrueuses des poissons de base, preuves du mal qui ronge l’archipel. Chaque espèce possède une à trois versions abominables, et certaines demanderont de la perseverance pour être dénichée. Il existe 150 sortes de poissons, répertoriées dans un carnet, ce qui incitera le collectionneur en vous à toutes les attraper. On possède un inventaire limité, d’autant plus que nos outils, type canne à pêche, prennent de la place sur le bateau. Les amateurs de Tetris vont se régaler à organiser leurs affaires, et il faudra parfois faire des choix pour ramener ce que l’on veut à bon port.

Dredge
A gauche, le jeu d’adresse, à droite l’inventaire. L’un de ces poissons n’est pas au top de sa forme, sauras-tu le reconnaître ?

On pourra revendre nos poissons dans les principaux ports. Chaque zone possède un point d’encrage plus ou moins civilisé, dans lequel on trouvera un marchand qui nous donnera plus ou moins d’argent, selon l’espèce et le poids de nos bestioles (les abominations valent plus cher). Avec cette thune, on pourra réparer notre bateau (on va souvent en avoir besoin), l’améliorer et acheter des outils plus sophistiqués. Mais l’argent ne suffira pas. Pour les améliorations, il faudra récupérer des ressources au fond de l’océan (planches, tissus…), sur le même modèle que la pêche. Ça permettra d’agrandir l’inventaire, et d’augmenter la taille de l’emplacement dédié à chaque outil, pour en installer du meilleur. Et pour débloquer du matériel plus efficace, il faudra chiner des petits rouages, relativement rares, que l’on peut trouver dans l’eau, en faisant des quêtes, ou autres. Parmi ce nouveau matos, on trouve des cannes à pêche qui permettent d’attraper des poissons dans de nouveaux biotopes ou dans les profondeurs, des lumières pour y voir plus clair de nuit, des casiers à crabes et filets pour choper certaines espèces de crustacés, des moteurs pour aller plus vite. Tout ceci permet de cadrer la progression, en nous guidant sur la voie voulue par le scénario sans nous contraindre physiquement sur la carte. L’amélioration du moteur permet, par exemple, de donner une impression de grandeur intimidante à la map en début de jeu (car on est lents), et à en faire un espace pas trop pénible à parcourir en fin de partie.

Dredge
On croisera de nombreux personnages, dont la plupart ont une histoire tragique.

Hormis ces PNJ récurrents, le jeu possède plein d’autres personnages à nous présenter, qu’ils soient dans les villages ou paumés sur des bouts de rochers isolés : un négociant qui vous rachètera des babioles trouvées au fond de la mer, un peintre qui pourra custom votre bateau, des bonhommes donnant des quêtes principales ou secondaires, et d’autres surprises. La carte recèle de petits secrets : îles à visiter, mystérieuses pierres à déchiffrer, trésors et poissons inaccessibles avant d’avoir un certain équipement… Dredge incite ainsi à explorer la map en profondeur, et à revenir à certains endroits après avoir avancé dans le jeu. La carte permet d’ailleurs d’y placer des annotations pour se souvenir de tout. Le contenu des quêtes tourne, évidemment, beaucoup autour de la pêche et nous pousse à creuser la recherche de poissons et à se servir de toutes les mécaniques et améliorations que l’on nous propose. Les missions annexes donnent des récompenses sympas, comme les fameux rouages ou des livres qui améliorent durablement certaines de nos compétences (pêche plus rapide, meilleurs tarifs aux magasins…).

Dredge
La carte vous sera d’une grande utilité

Parlons maintenant de l’horreur. Qu’on s’entende bien, Dredge ne va pas vous pousser à l’infarctus. Mais il maîtrise plutôt bien la formule horrifique. Le jeu dispose d’un système de temps qui s’écoule et d’un cycle jour/nuit. Quand le soleil se couche, le brouillard se lève, et on ne voit plus rien en dehors de ce qu’éclairent nos phares. On apercevra parfois qu’au dernier moment les rochers sur lesquels on fonce. La musique se coupe ou devient oppressante. Plusieurs monstres marins occupent certaines zones, et utilisent des techniques vicieuses pour nous attaquer. Certains sont également actifs en journée. Une jauge de folie, représentée par un œil qui s’ouvre, augmente à force de naviguer dans la nuit, en croisant des espèces de courants d’air écarlates, ou en rencontrant des monstres. Cette mécanique rigolote, chère à tout univers lovecraftien, va créer quelques moments de panique. Plus votre personnage est fou, plus il est susceptible d’avoir des hallucinations, dont le pouvoir de nuisance est bien réel : phares qui s’éteignent, rochers imaginaires qui se dressent sur votre chemin, monstruosités agressives… On note qu’à chaque obstacle percuté ou attaque subit, notre bateau prend des dégâts. Notre matériel peut être détérioré, et on peut également perdre le stuff que l’on a dans la cale. Au bout de quelques dégâts, qui dépendent du niveau d’amélioration de la coque, c’est game over. Bien évidemment, le jeu vous incite à faire des excursions nocturnes, notamment pour récupérer des poissons qui ne sortent qu’à ce moment-là. Pour faire baisser la jauge de folie, il suffit de dormir sur n’importe quel port.

Dredge
Mais non, tout va bien, c’est dans ta tête

Au-delà de ces mises en scène horrifiques, c’est toute l’ambiance de Dredge qui est pesante. Les couleurs sont souvent pâles, le jeu tire beaucoup sur le gris. Les graphismes (magnifiques au demeurant), et notamment le design des PNJ, ont un côté rugueux, avec ces textures faites de formes angulaires. Les dialogues alimentent l’impression d’un grand mystère, d’une terreur indicible. Le lore avance grâce à ces indications floues, et à quelques messages trouvés dans l’eau, qui apportent plus de questions que de réponses. La mer apparaît comme un ennemi qui feint la mort pour mieux nous surprendre. J’ai limite ressenti plus de thalassophobie sur ce jeu que sur Subnautica. L’OST joue aussi beaucoup sur le côté déprimant de Dredge, enchaînant les morceaux sombres, mélancoliques et miséreux. Le sound design fonctionne très bien, autant par les sons récompensant une réussite que par son côté oppressant dans les moments de tensions.

Dredge
Dredge offre aussi de très jolis paysages, sans parler des couchers de soleil

Dredge est donc un bon jeu, qui maîtrise bien sa formule. Pour moi, il a un seul défaut, mais qui est assez frustrant, et qui peut expliquer sa défaite aux Games Award : Dredge a l’air d’être un petit jeu, une sorte de jeu flash amélioré (j’abuse un peu, mais c’est pour faire comprendre mon ressenti). Déjà, la durée de vie est assez courte. Ensuite, il y a peu de mécaniques de gameplay, et les objectifs de quêtes se ressemblent énormément. Ça manque un peu d’inventivité. Je pense que si l’aventure avait été plus longue, on se serait ennuyé. De plus, Dredge est trop facile. Je n’ai jamais connu de game over de toute ma partie. C’est compliqué pour un jeu qui veut te mettre sous tension.

Can you geek it ?

Yes you can !

Dredge est un très bon jeu, qui propose une aventure originale et maîtrisée. Le triptyque exploration/chasse au loot/upgrade fonctionne bien et cadre correctement la progression. L’ambiance et le scénario rendent bien hommage à Lovecraft, et sont à la hauteur de la promesse initiale. On regrettera seulement un côté petit bras, avec une aventure un peu répétitive, que l’on terminera rapidement et sans grandes difficultés.

Le par JuanPatatos

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