Pour commencer
Développé par les Montpelliérains (dont d’anciens de chez Ubi) Sandfall Interactive, dont c’est le premier jeu, et édité par Kepler Interactive (SIFU, Scorn, Tchia), Clair Obscur : Expedition 33 est un JRPG qui a beaucoup fait parler de lui.
Tout d’abord, parce qu’à l’heure ou j’écris ces lignes, sa note utilisateur sur Metacritic, site référence en la matière, est de 9.7, soit la plus haute note utilisateur de tous les temps. Et même si on donne à cette notation la valeur que l’on souhaite, ça reste très élevé.
Ensuite, parce que c’est français (cocorico).
Et pour terminer, parce que ce jeu est magnifique de bout en bout, et met une vitesse à une bonne partie de l’industrie, qui on l’espère, verra les gros studios s’inspirer un peu plus de ce qu’on nous propose ici plutôt que de nous ressortir leurs vieilles soupes fadasses.
Ah oui, c’est disponible sur le GamePass, ou proposé à 45 euros à l’achat, pour enfoncer le clou.
Pour se mettre en condition
On écoute quoi ?
L’OST du jeu est incroyable, pas besoin d’autre chose, c’est un No Skip.
On boit quoi ?
Du pif, genre un Pinot noir tiens.
On mange quoi ?
Un jambon beurre ou un pâté cornichon, au choix.
Alors, ça dit quoi ?
L’histoire, découpée dans Clair Obscur en plusieurs actes, telle une pièce de théâtre, est originale, poétique, et tout bonnement grandiose tant sa narration est bonne.
On nous met dans la peau d’un personnage nommé Gustave, qui évolue dans la ville de Lumière, une sorte de Paris fantastico-dystopique. Et quand je parle de dystopie, ça veut forcément dire que la vie là-bas n’est pas toute rose.
Malgré le côté charmant et chatoyant de Lumière, tous les ans les habitants doivent se préparer chaque année à ce qu’on appelle le Gommage, évènement lors duquel disparaissent tous les gens d’un certain âge (au début de l’aventure, la génération de ceux qui ont 34 ans). Oui oui, ils disparaissent, sont tout simplement effacés.
Cet évènement est l’œuvre de la Peintresse, gigantesque entité que l’on voit au loin, peindre chaque année sur son monolithe des chiffres décroissants, tel un compte à rebours morbide.
Et comme le veut la tradition, année après année, Lumière envoie un groupe de personne, les Expeditions, pour tenter de la stopper. La nôtre, c’est l’Expedition 33.
33, comme le chiffre qu’elle peint au début de l’aventure. On sait donc d’avance qu’avant la fin du jeu, ce sera soit elle, soit nous.
Côté histoire, je ne peux pas vraiment en dire plus, sous peine de vous spoiler les nombreux (et incroyables) twists proposés tout au long de l’aventure. On ajoutera seulement qu’elle est plus complexe qu’il n’y parait, et traite de sujets profonds, qui nous feront parfois poser la manette tant ils peuvent résonner dans la vraie vie.
Ah oui, petit bémol sur la narration durant l’acte 2, et peu plus poussive et décousue. On a d’ailleurs parfois envie de secouer un certain personnage dont on sait qu’il sait plus qu’il n’en dit.
Je terminerai cette partie en parlant du doublage, d’une grande qualité, que ce soit en VO ou en VF. Puis entendre des « putain » dans un jeu, ça me fait toujours du bien.
Parlons d’un sujet qui a fait couler beaucoup d’encre en ce qui concerne ce Clair Obscur : le gameplay de combat. D’abord annoncé comme un tour par tour classique, ce n’est en réalité pas complètement le cas, on a ici plutôt un système inspiré de la série Persona.
Mais alors, qu’est-ce qui le différencie d’un tour par tour classique ? Et bien deux choses :
- Des QTE, à effectuer à chaque action spéciale, afin de causer plus de dégâts, ou d’en subir si on les rate.
- Des esquives ou parades / ripostes, à effectuer selon un timing serré (surtout pour les parades) lorsque l’on subit une attaque.
J’ajoute que la boucle de gameplay change selon le build choisi pour chaque personnage ainsi que selon la composition de votre équipe, mais ça, vous le découvrirez par vous-même.
Alors, est-ce que ça fonctionne ? Et bien j’aurais préféré un tour par tour classique, cependant, je suis obligé de mettre de côté certaines de mes habitudes de boomer afin de constater que ça fonctionne. On s’y laisse prendre très facilement, et c’était pas gagné d’avance, parce que proposer un mélange tour par tour + QTE en 2025, sur un titre destiné au grand public, ça paraissait quand même bien casse gueule.
Alors l’avantage, c’est que ça fonctionne très bien, ça ajoute une grosse dose de dynamisme, qui convient très bien à ceux que les mécaniques de combat classiques feraient soupirer. L’inconvénient, c’est qu’on peut faire le jeu quasi uniquement avec cette mécanique de parade / esquive, au détriment du reste de l’évolution de notre personnage. D’ailleurs, les parades qui se font à l’aide du son des attaques des ennemis, quel plaisir. Mais vous le découvrirez par vous-même.
Et justement, qu’en est-il de cette évolution ?
Chaque personnage a son propre gameplay et arbre de compétence, et on se prendra à faire du theorycraft grâce au système luminas (des compétences passives) proposé, et aux différentes synergies entre chaque protagoniste.
Cependant, les différents attributs que l’on augmente au fil de l’aventure (vitalité, force, agilité, défense, chance) sont plus qu’anecdotiques, et le scaling des armes leur correspondant également, du moins jusqu’au endgame.
C’est un peu dommage, mais ça rend le titre accessible au plus grand nombre, sans non plus tomber dans un gameplay fade, moyen.
Pour ce qui est de l’exploration, Clair Obscur nous propose plusieurs grandes zones en couloir reliées entre elles par … une world map ! Proposer ça en 2025, c’est couillu. Ca m’a rappelé l’époque FFVIII, et arraché une larme de nostalgie.
Et surtout, ça fonctionne. La map, qui peut d’abord paraitre un peu petite, diffuse son contenu au fil de l’aventure, et se révèle en réalité assez fournie.
Pour ce qui est des différentes zones, elles ont toutes leur propre identité et intérêt. L’exploration, bien que sommaire car en quasi ligne droite, est toujours récompensée.
Parlons maintenant un peu de la direction artistique du jeu.
Et bien c’est simple, c’est tout bonnement magnifique. C’est hallucinant, tout est beau. Chaque arrivée dans une zone est une nouvelle gifle, aucun élément n’est laissé au hasard, et le fait de voir la Peintresse et son Monolithe se rapprocher au fil de l’aventure nous donne toujours l’envie de voir tout ce que Clair Obscur a à nous montrer.
Et la musique bordel ! Mais quel choc !
La bande-son, épique, est toujours juste, et participe également au lore quand on essaie de comprendre ce qu’elle veut nous raconter. Même ses rares absences, quand elles arrivent, font sens dans l’histoire. C’est simple, je ne pense pas avoir entendu une bande-son de jeu vidéo de cette qualité, tout en étant si pertinente, de toute ma vie de gamer.
Composée par Lorien Testard et (parfois) interprétée par Alice Duport-Percier, elle est disponible ici.
Abordons maintenant rapidement la durée de vie. Clair Obscur se termine en une trentaine d’heures, et en deux fois plus si vous souhaitez faire le contenu annexe (notamment en endgame).
C’est ni trop, ni trop peu.
D’ailleurs, si certains se demandent, oui, il faut faire la fin du jeu avant de compléter le jeu à 100%, sous peine de rouler sur les derniers ennemis, notamment le boss de fin.
On nous propose également un NG+ pour les plus mordus et / ou complétionnistes.
Ah oui, je vais rapidement ouvrir une petite parenthèse pour liste les quelques défauts du jeu, car il en a :
- Les quelques phases de plateformes, en terme de gameplay, sont mal foutues.
- Une synchronisation labiale qui ne fonctionne évidemment pas en VF.
- Quelques légers bugs et softlocks.
- Une narration un peu moins bonne dans l’Acte 2.
- Quelques mécanique de RPG laissées pour compte, ou avec peu d’intérêt.
Voilà, autant dire que c’est pas grand chose. En fait, c’est tellement peu bloquant dans l’aventure qu’est Clair Obscur, que je me devais quasiment de citer ses faiblesses une par une.
Allez, on passe à la conclusion !
Can you geek it ?
Yes you can !
Vous devez même.
Clair Obscur est un de ces jeux qui change le regard que l’on porte sur le monde vidéoludique, nous transporte, nous marque, qui pourrait changer l’industrie même. La preuve qu’un succès mondial ne tient presque qu’à ça : travailler bien, et assumer le produit de son travail. Insuffler une âme dans ce qu’on propose, sans tenter sans cesse de plaire à tous les joueurs, et à ses actionnaires.
Clair Obscur : Expedition 33 est un cri d’amour envers le jeu vidéo, et plus particulièrement envers le JRPG. C’est beau, c’est épique, c’est juste, ça prend au tripes du début à la fin. Il est exceptionnel malgré ses petits défauts, et pourra largement prétendre au GOTY cette année.
Il a une âme, et peu de jeux m’ont marqué comme ça durant mes dernières années de gaming.