Darkwood

Nyctophobie

Pour commencer

Je ne joue que très peu à des survival horror, étant trop flippé par ce genre d’ambiance pour vraiment apprécier l’expérience (et c’est de pire en pire avec l’âge, faudra m’expliquer). Puisque j’aime changer mes habitudes et me faire mal, j’ai acheté Darkwood, qui m’a intrigué par sa proposition qui me semblait originale. J’ai mis le temps, mais j’ai réussi à aller au bout. Récit d’une balade en forêt.

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Pour se mettre en condition

On écoute quoi ?

La nuit m’appelle d’Oxmo Puccino. Un refrain qui prend tout son sens dans ce jeu.

On boit quoi ?

Une horrible gnôle, très forte et sans goût. De l’alcool à 90 quoi.

On mange quoi ?

Une poêlée de champignons. Vous allez en voir de toutes les sortes.

Alors, ça dit quoi ?

Darkwood est un survival horror en vue du dessus dans lequel nous incarnons un homme perdu au cœur d’une forêt d’Europe de l’Est, sans que l’on sache trop comment il s’est retrouvé là. Ces bois semblent se développer de manière surnaturelle et envahissante, et interdisent la sortie à quiconque se trouve à l’intérieur. Pour ne rien arranger, la faune est dangereuse et les habitants des lieux souffrent d’une étrange maladie qui les transforme doucement en monstruosités agressives. Bref, il va falloir trouver un moyen de partir d’ici en un seul morceau, notre seule piste étant de retrouver un certain docteur qui semble impliqué dans tout ce joyeux bordel. Le scénario est obscur, et ne se révèle qu’à travers quelques PNJ phares, des dialogues qui se débloquent avec les bons items, des bribes de discussion, de la narration environnementale. Le lore reste très intéressant et bien ficelé pour qui prend le temps de le découvrir. Il existe plusieurs fins différentes, et de nombreux embranchements selon votre comportement avec les PNJ. Comme souvent, j’ai fini sur Youtube pour tout capter, et il existe de nombreuses théories pour tenter d’éclairer les nombreuses zones d’ombre. À ma décharge, il faut aussi savoir que le jeu n’est pas traduit en français. Too bad.

Darkwood
Ça commence bien tout ça

Il existe deux phases bien distinctes dans Darkwood : le jour et la nuit. Les journées, plus longues, correspondent à l’essentiel de l’avancement dans le jeu. À partir de notre planque, on va explorer les environs. La map se divise en trois zones, accessibles les unes aux autres sans temps de chargement, mais qui ne seront pas ouvertes dès le début du jeu. On devra prendre le temps de visiter chaque zone, en découvrir les lieux importants, et rencontrer les différents PNJ qui nous aiguilleront via des quêtes plus ou moins cryptiques (un journal vous aidera à y voir un peu plus clair). C’est également une phase où l’on va récupérer beaucoup de stuff. Darkwood fonctionne avec un système de craft qui nous permettra de nous équiper pour faire face à la forêt : heals, sources de lumière, crochets, armes de corps-à-corps et armes à feu… S’armer et pouvoir se soigner est essentiel, car les mauvaises rencontres seront nombreuses et les combats représentent une part importante du gameplay de Darkwood. Le bestiaire, sans être démesuré, se renouvelle bien à travers les différentes zones. On reviendra sur les combats plus tard. Enfin, on peut mentionner l’existence de champignons et autres aliments à « cuisiner », qui nous permettront de passer des sortes de niveaux (avec bonus et malus à choisir pour notre personnage) et nous plongeront dans des rêves étranges qui rythmeront notre progression dans l’aventure.

Darkwood
Les PNJ sont vraiment iconiques.

La nuit, il vous faudra absolument rejoindre votre planque, s’en éloigner résultant à une mort certaine. Pour autant, vous n’y serez pas en sécurité. Divers monstres essaieront d’infiltrer votre refuge et de vous faire la peau. Vous pouvez fabriquer des pièges et des barricades pour les ralentir, utiliser du mobilier pour condamner portes et fenêtres, mais le combat est quasiment inévitable. Il vous faudra également alimenter votre groupe électrogène en essence pour ne pas vous défendre dans le noir complet, ce qui serait très dangereux. Vos premières nuits seront terrifiantes, et vous attendrez l’aube avec une impatience infantile. Si vous survivez, vous gagnez un nombre de points à pouvoir dépenser chez un marchand que vous trouverez chaque matin dans votre salon. Durant cette phase, le temps s’arrête pour vous laisser le temps de faire vos emplettes, de retaper les destructions causées dans la nuit et pour organiser au mieux votre prochaine journée.

Darkwood
Vous allez vous pisser dessus pendant les premières nuits

Darkwood prévient dès son écran de chargement : c’est un jeu difficile, qui ne prend pas le joueur par la main. Et pour le coup, on va se sentir paumé pendant longtemps. Pour avancer dans l’aventure, on va commencer par s’approprier les alentours de notre planque. Les environnements se ressemblent beaucoup, et seuls certains lieux vous serviront de repères : une maison en ruine, un silo à grain, une carrière de pierre… La map n’indique que ces lieux principaux et pas votre position précise. On est donc tout le temps un peu perdu, et il est vite fait de tomber sur des ennemis ou des pièges qu’on ne connaissait pas, parce qu’on a fait un petit détour en rentrant à la maison. À la tombée du jour, ce genre de situation devient vite angoissant. Évidemment, dès que l’on commence à maîtriser une zone, on doit passer à la suivante et refaire tout ce travail. Le jeu reste également flou sur vos objectifs, ne vous guidant qu’à court terme, et vous fera perdre le fil avec de nombreux lieux optionnels, quêtes secondaires et passages fermés. Vous n’apprendrez également rien sans expérimenter : les effets et fonctionnements de vos objets, les paterns variés de vos ennemis. Les premières rencontres sont d’ailleurs souvent sources de grand stress. Tous ces éléments créés un fort inconfort qui appuie le sentiment de peur.

Darkwood
Pour ne rien arranger, la carte est générée de manière procédurale, et changera à chaque partie.

Et Darkwood possède d’autres idées pour faire flipper, malgré ses graphismes minimalistes. Le jeu a beau être en vue du dessus, vous ne verrez que ce qu’il se trouve dans un cône en face de vous. Il est donc très régulier d’être surpris par quelque chose dans votre dos. Le jeu joue énormément avec cette mécanique, multipliant les environnements avec des obstacles bloquant votre champ de vision, ou misant sur la météo pour réduire votre visibilité. Les mises en scène sont géniales d’intelligence et vous glaceront le sang (le prologue est dingue dans le genre). L’horreur de Darkwood est fine, suggérée, à travers un sound design terrifiant (orage, lamentations, bruits de pas…), des objets qui bougent dans votre angle mort, des lignes de dialogues troublantes qui surgissent du noir, sans avoir besoin d’être doublée. Ce jeu veut que votre imagination fasse le travail, et l’immersion est totale. On sursaute, on regarde partout frénétiquement. On note la quasi-absence de musique, remplacée par des nappes de sons typiques des ambiances horrifiques.

Par ailleurs, votre personnage est très vulnérable. Le système de combat est assez instinctif, lourd, et rend bien la violence des coups que vous portez. Une barre d’endurance empruntera vos mouvements, raccourcira vos courses et créera de vrais moments de panique. Enfin, vous serez très souvent menacés par le manque. Vous aurez constamment besoin de matériel pour réparer vos barricades, vous éclairer, réparer vos armes. Il vous faudra donc toujours être actifs et pousser vos recherches, y compris dans des coins où vous n’aurez pas envie d’aller. Tout ceci fait de Darkwood un jeu éreintant, qui rend la progression satisfaisante. On développe un plaisir certain à maîtriser doucement ce monde hostile et une fascination pour son atmosphère mystérieuse, glauque et grotesque.

Darkwood
Seul au milieu des bois, la mécanique du champ de vision prend tout son sens

Cependant, je trouve que les préceptes de Darkwood sont parfois trop extrêmes et peuvent devenir une faiblesse. La bascule entre la peur et la lassitude est assez fine. On risque par exemple de s’ennuyer à force de tourner en rond sans savoir quoi faire (c’est galère à expliquer ici, mais je trouve qu’il y a une grosse erreur de gamedesign dans la première partie du jeu). Le nombre de contenu inaccessible est décourageant, on passe notre vie à tomber sur des portes et des coffres fermés. Je pense que j’ai loupé la moitié du contenu du jeu, alors que j’ai fait l’effort de fouiller. On va trouver un nombre hallucinant d’items dont on ne sait pas quoi faire. On va faire des quêtes secondaires qui ne bousculent pas le scénario pour avoir des récompenses nazes, ce qui ne donne pas l’impression d’un accomplissement (même si elles peuvent valoir le coup juste pour leur mise en scène glaçante). L’idée de laisser le joueur dans le flou est bonne, mais là c’est trop cryptique. C’est dommage, le jeu est plus prenant quand on sait un minimum ce que l’on doit faire.

Darkwood
Ces coffres et portes à code vont vous rendre fous. J’ai dû réussir à en ouvrir 2 dans tout le jeu.

Par ailleurs, si le système de combat est assez immersif, il n’en reste pas moins assez mauvais. Les coups ont une inertie horrible et les attaques ennemies stoppent notre animation d’attaque. Nos déplacements sont lourds (malgré le bouton d’esquive), la barre d’endurance nous met dedans et on perd tout le temps son adversaire de vue. En face, les ennemis sont vifs et brutaux. C’est super facile de se faire coincer et rouer de coups. Du coup, on meurt tout le temps, du début à la fin du jeu. Et, en mode normal, on se rend compte que ce n’est pas si punitif. Il suffira juste de retrouver votre cadavre pour récupérer votre stuff. Ça enlève complètement la peur. Par exemple, on peut complètement se laisser mourir la nuit, si on a assez d’équipement pour ne pas avoir besoin du marchand, ou des objets de valeur à lui revendre. Enfin, les phases nocturnes deviennent balourdes à mesure de l’aventure, puisqu’assez longues et ne faisant pas avancer l’histoire. Ça donne un côté « durée de vie artificielle ». Quand on arrête de les redouter, elles commencent à nous lasser. Dans le même genre, la fouille en phase de jour est moins intéressante en fin de jeu, quand notre équipement est augmenté à fond et que l’on a du matériel pour tenir des semaines entières. Pour le coup, il aurait fallu nous garder dans le manque jusqu’au bout.

Can you geek it ?

Yes you can !

Pour conclure, c’est un petit oui. Darkwood est une expérience immersive, avec de nombreuses idées brillantes pour réinventer la peur. C’est également un jeu prenant, qui vous impliquera entièrement et vous demandera de faire marcher votre tête. C’est enfin un univers singulier et passionnant à découvrir. Malheureusement, il pousse ses propres concepts trop loin, et rebute par le flou total dans lequel il nous plonge et par des éléments de gameplay vraiment bof. À découvrir quand même, il y a un gros potentiel malgré les défauts.

Le par JuanPatatos

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